Mariage Orange-Bouygues Telecom : une décision d'ici la fin du mois ?

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Comme vous le savez, Bouygues et Orange ont officiellement entamé des discussions préliminaires pour un éventuel rapprochement depuis quelques semaines (voir ici), les premiers contacts ayant même eu lieu dès la fin 2015 (voir là).

Même si un accord de confidentialité a été signé entre les deux opérateurs, certaines informations et autres rumeurs fuitent régulièrement dans la presse. Tâchons de faire un point aujourd'hui de ce que l'on sait.


C'est Martin Bouygues lui-même qui a approché Orange et est donc à l'origine de l'idée d'un mariage avec sa filiale Bouygues Telecom, Stéphane Richard, PDG d'Orange l'a confirmé il y a peu à l'occasion de ses voeux à la presse, avant de préciser qu'il estime le succès de l'opération à une chance sur deux, en reconnaissant que l'opération est compliquée tout en posant trois conditions : "qu'elle soit évidemment créatrice de valeur pour nous, qu'elle soit socialement irréprochable et elle le sera et que les risques soient maîtrisés".


En effet, nombreux sont les obstacles à un tel mariage qui ferait repasser le nombre d'opérateurs télécoms en France de quatre à trois, comme avant l'arrivée de Free Mobile. Le groupe Orange-Bouygues Telecom aurait alors une position dominante à la fois sur le marché du fixe et du mobile. Afin d'éviter un rejet de l'Autorité de la Concurrence, des cessions d'actifs (clients, fréquences, antennes, boutiques, etc) sont donc à prévoir en amont. Stéphane Richard a déjà reçu Michel Combes, le président non exécutif de SFR et Xavier Niel, fondateur de Free à ce sujet.

D'après certaines sources, SFR reprendrait les abonnés mobile B&YOU ainsi que des clients Bbox pour environ 1,5 milliard d'euros mais également des fréquences pour environ 500 millions. Free quant à lui, obtiendrait pour environ 2,5 milliards d'euros des fréquences, des clients mobile et Bbox. Pour un montant moindre, il récupérerait aussi le réseau d'antennes de Bouygues Telecom et la majorité des 550 boutiques de Bouygues Telecom avec leurs 2.500 à 3.000 salariés. Les deux opérateurs s'engageraient à conserver les effectifs au moins 3 ans. Enfin, Coriolis serait intéressé par les 1,7 million de clients entreprise de Bouygues Telecom et aurait entamé des discussions en ce sens. Au total, Orange a calculé qu'il lui faudrait céder pour 6 milliards d'euros d'actifs. D'après Natixis, l'Autorité de la Concurrence pourrait obliger Orange à se défaire de beaucoup plus d'actifs de Bouygues Telecom, de 70 à 80 %, un véritable dépeçage avec deux grands gagnants : Free et SFR....


Autre point délicat, le groupe Bouygues souhaiterait obtenir 10 milliards d'euros pour Bouygues Telecom dont 8 milliards sous forme d'actions lui permettant de détenir au moins 15 % du capital d'Orange, ce qui réduirait la part de l'Etat à 19,7 %. Ce dernier n'aurait alors qu'un tiers des droits de vote en assemblée générale. Il a déjà déclaré vouloir conserver une minorité de blocage grâce aux votes doubles de la loi Florange et Orange tient à ce que son principal actionnaire conserve au moins 20 % pour assurer le soutien des agences de notation, or l'Etat risquerait de devenir minoritaire à la prochaine opération. Aussi les ambitions de Bouygues ont été revues à la baisse, on ne parle plus désormais "que" d'un montant de 9,5 milliards d'euros pour 11 % des actions Orange.


Olivier Roussat, actuel PDG de Bouygues Telecom, qui était pressenti pour diriger l'intégration de son entreprise chez Orange, a déjà renoncé à cette tâche et pourrait finalement hériter à terme de la direction générale du groupe Bouygues pour la succession de Martin Bouygues.


Une décision devait initialement être prise et annoncée pour le 16 février prochain, date des résultats annuels d'Orange mais semble désormais être repoussée au 24 février, jour des résultats de Bouygues. Quoi qu'il en soit, nous serons bientôt fixés sur l'avenir de Bouygues Telecom dans les semaines à venir, en espérant que cela n'aboutira pas à des augmentations pour les clients, même si Stéphane Richard s'est malgré tout engagé en ce sens en déclarant qu'un passage de quatre à trois opérateurs ne se traduirait "en aucune manière" par une hausse des prix.

Sources : Le Monde, La Tribune, Le JDD & Ouest-France.

[MàJ 03/02/16] Stéphane Richard s'est exprimé en marge du Digital Society Forum à Paris sur l'issue des négociations en cours : "Je suis incapable de donner un calendrier aujourd'hui. De toute façon, on ne peut pas mettre des mois, donc je ne sais pas si ce sera fin février ou mi-mars, mais ce sera dans ces eaux-là" (source : Les Echos).